Bandeau
Cercle Genealogique de l’Aveyron
Slogan du site
Descriptif du site
Général Baron Philippe HIGONET
Comment un Marmot (*) est devenu Général et Baron
Article mis en ligne le 27 juillet 2018
dernière modification le 25 juillet 2023

par Suzanne BARTHE
Général Baron Philippe HIGONET

Vendredi 5 août 1831. Six heures du matin. Du sommet de la colline qui domine le château de Veyrac, Philippe Higonet surveille les travaux de « défoncement » et de drainage des coteaux. Il y a un an, après avoir donné sa démission de député du Cantal, il a entrepris la mise en valeur du domaine agricole du château, situé à trois kilomètres d’Aurillac. Assis sur une grosse pierre, il range dans son écritoire de voyage [1] une feuille de papier sur laquelle

Ecritoire de campagne du Général

il a noté les résultats de ses observations. En fermant à clef le pupitre, il regarde d’un air amusé l’inscription dont les rayons du soleil matinal font briller les lettres d’or : « Le Général Baron Higonet ». Général et baron, lui, aux origines roturières ! Comment est-ce possible ? Soudain, dans cet environnement paisible et serein, propice au recueillement, les souvenirs surgissent et lui rappellent les grandes étapes de sa vie mouvementée.

Portrait d’époque du colonel Joseph Higonet

Fils de Joseph Higonet, maître apothicaire, et de Marie Massabuau, Philippe [2] est né le dimanche 5 mai 1782, à Saint-Geniez-d’Olt (une plaque en marbre commémorant sa mémoire et celle de son frère Joseph est apposée sur la maison natale, Place du Marché). Il n’a pas 22 ans lorsqu’il quitte le laboratoire de son père pour rejoindre le camp de Boulogne. Le 20 avril 1804, il s’engage dans le 4ème Régiment de Ligne. Cinq jours après son enrôlement comme soldat, il est nommé caporal, puis sergent le 30 juin. Quelques mois plus tard, le 9 février 1805, il est affecté avec le grade de lieutenant au 108ème Régiment de Ligne qui est commandé par le colonel Joseph Higonet(2), son frère ainé ! La guerre ayant été déclarée à l’Autriche, Napoléon quitte Boulogne et se dirige vers le Rhin avec son armée de cent soixante-dix mille hommes. Le 108ème appartient au 3ème corps d’armée commandé par le maréchal Davout. Il franchit le Danube et se dirige vers Munich. Le 8 novembre 1805, le régiment participe au dur combat de Maria-Zell où la conduite au feu du lieutenant Philippe Higonet est qualifiée « d’ audacieuse et brillante ». Quelques jours plus tard, le 2 décembre 1805, cet officier se signale encore par une action d’éclat à la bataille d’Austerlitz où il est blessé d’un coup de feu à la cuisse droite.

Higonet blessé

Philippe Higonet est nommé capitaine le 4 janvier 1806. Il reçoit la « croix » de la Légion d’Honneur le 14 mai. Alors que Napoléon remporte la victoire d’Iéna où son frère Joseph est tué, le nouveau capitaine fait preuve d’habileté et d’audace à la bataille d’Auerstaedt remportée par Davout, le 14 octobre 1806. Il se distingue le 8 février 1807 dans une action téméraire près du « fameux cimetière d’Eylau », où il est à nouveau blessé à la jambe gauche et au bas-ventre. En 1809, il participe aux batailles d’Eckmühl et de Wagram. Sa conduite héroïque est récompensée le 22 juin 1809 par son affectation au 1er Régiment de Grenadiers de la prestigieuse Garde Impériale.

Avec sa nouvelle unité, il prend part en 1812, à la campagne de Russie, au cours de laquelle il se fait toujours remarquer par son courage, notamment à la bataille de la Moskowa et durant l’horrible retraite.

Grandiers à pied de la Garde Impériale

Ses actions d’éclat lui font mériter le grade de major et l’honneur de commander le 34ème Régiment Provisoire Bis, composé en partie avec les débris de l’ancien 108ème.

Durant la campagne d’Allemagne, il est enfermé en septembre 1813, avec le 13ème Corps de Davout dans Hambourg. Le maréchal lui confie la garde du Fort de l’Etoile, point de mire de l’ennemi. Mais le valeureux major, par son extrême surveillance et son audacieuse opiniâtreté, tient en échec toutes les tentatives d’assaut des assiégeants. Le 1er mars 1814, Davout nomme colonel celui qu’il appelle « l’un des plus brillants officiers de l’armée ». L’empereur ayant abdiqué, Davout se rend aux forces coalisées après avoir résisté durant huit longs mois.

La première Restauration a lieu le 30 mars 1814. Louis XVIII décerne la croix de Chevalier de l’Ordre de Saint Louis à Philippe Higonet. Peu de temps après, le colonel reçoit le commandement de l’Aveyron. Mais Napoléon revient de l’ile d’Elbe. Le Maréchal

Davout, ministre de la Guerre durant les Cents Jours, place son ancien subordonné à la tête du 10ème Régiment de Ligne, puis le charge de « conduire à l’ennemi » son ancien régiment, le 108ème. A sa tête le colonel Higonet va se couvrir de gloire. D’abord le 16 juin, aux Quatre-Bras, il sauve la Division Bachelu menacée d’être anéantie par deux régiments anglais, puis le 18, à Waterloo, alors que l’armée française est en déroute. Il ne quitte sa position que sur l’ordre exprès du Maréchal Ney (fusillé le 7 décembre 1815) apporté par La Bédoyère (fusillé le 19 août 1815). L’intrépide Philippe Higonet se replie, mais doit faire face plus d’une fois à l’ennemi. Au cours de ces trois journées d’âpres combats, il est blessé deux fois par des coups de lance et il a eu deux chevaux tués sous lui aux Quatre-Bras.

Sous la Restauration, il est procédé à une nouvelle organisation de l’Armée. Les anciens régiments de ligne sont remplacés par des légions départementales.

Le 19 août 1815, Louis XVIII désigne le colonel Higonet pour former et commander la Légion du Cantal. A Aurillac, il réussit avec bonheur dans toutes les missions qui lui sont confiées et par ses qualités humaines, il se fait accepter d’emblée par toutes les couches de la société. Surnommé le « beau colonel », il exerce une véritable séduction autour de lui et tout particulièrement auprès d’Augustine,la fille du Baron Jean-François de Jujeals de Peyrac de Veillan. Il l’épouse le 8 juin 1816. Peu de temps après s’être marié, Philippe Higonet reçoit le titre de baron. Il choisit pour devise de ses armoiries « Virtus, labor, pietas ». Ces trois mots résument son existence et sa personnalité.

Les légions étant supprimées, le colonel Philippe Higonet se voit confier le commandement du 9ème Régiment de Ligne en garnison à Metz. En 1823, il participe avec son régiment à l’expédition d’Espagne. Le 11 août 1823, pour récompenser ses actes de bravoure au siège de Pampelune, il est promu maréchal de camp (général de brigade). Ayant reçu le 3 septembre, la mission d’assiéger San Sébastien, il obtient la capitulation de la ville le 28. La campagne terminée, il rentre en France en mars 1823. L’année suivante,le 8 juin1824, il est promu Commandeur de l’Ordre de la Légion d’Honneur et élevé à la dignité de Grand Officier de l’Ordre de Saint Ferdinand d’Espagne.

De retour dans le Cantal, le Général Higonet va entreprendre une nouvelle carrière.Il est élu député du 1erarrondissement du Cantal le 18 novembre 1827. Mais ses travaux parlementaires vont être rapidement interrompus. En effet, par ordonnance du 24 juillet 1828, il lui est attribué le commandement de la 2ème brigade pour participer à l’expédition de Morée en Grèce. Il va s’y distinguer d’une part, en s’emparant de la citadelle de Navarin tenue par les Turcs et d’autre part, en prenant des mesures efficaces et judicieuses pour éviter la propagation de la peste qui sévissait dans le Péloponèse.En février 1829, lors de son retour en France, le roi Charles X le félicite, en audience privée, pour ses interventions militaires et humanitaires. Le 22 février 1829, il est promu commandeur de l’Ordre de Saint Louis et de l’Ordre du Sauveur de Grèce.

Le général Higonet reprend ses activités parlementaires.Il défend notamment la condition des officiers mis à la demi-solde et les intérêts des agriculteurs. Mais après la Révolution des « Trois Glorieuses », il démissionne de son mandat de député le 12 août 1830.

Tels sont les principaux évènements que se commémore le baron Philippe Higonet en cette belle matinée du 5 août 1831.

Château de Veyrac

Mais à présent, après les combats et le tumulte des armes, il va goûter à la sérénité d’une existence paisible en se consacrant, durant dix-huit ans, à l’administration du domaine du château de Veyrac auquel il a apporté d’importantes améliorations.

En le sortant de « sa retraite », la Révolution de 1848 met fin à ces dix-huit années« d’exil politique ». Il afferme sa propriété pour pouvoir se présenter aux élections législatives. Battu honorablement, il accepte la défaite avec une dignité noble et touchante. Après le coup d’état du 2 décembre, de nouvelles élections sont devenues indispensables. A nouveau, Philippe Higonet est pressenti pour se représenter. Mais comme il refuse de prêter le serment exigé aux candidats,il doit se désister.

Content de son sort et n’étant troublé par aucun regret, le général va passer les dernières années de sa vie en conservant toute la vigueur de son caractère et en restant fidèle à ses convictions. Le dimanche 6 février 1859, Philippe Higonet souffre cruellement des blessures reçues à Eylau. Il se couche pour ne plus se relever. Il meurt le 12 février, âgé de 77 ans. Il est enterré le lundi 14 février au cimetière Massigoux d’Aurillac. Sur une face de la stèle, son nom et ses distinctions honoriques sont encerclées par une mandorle (amande ovale) sur laquelle sont inscrits les noms de ses principales batailles : Maria-Zell, Austerlitz, Eylau, Les Quatre Bras, San Sébastien, Pampelune, Navarin et le Château de Morée.

Bernard MAURY

Membre de la Société d’Études Millavoises

NDLR :

(*) « Marmot » : gentilé des habitants de St-GENIEZ-d’Olt (Cf l’ouvrage St Geniez-d’Olt-et-d’Aubrac des femmes, des hommes, et leurs racines page 13
http://www.genealogie-aveyron.fr/spip.php?article1110

Nous remercions M. Bernard MAURY pour cet excellent article qui complète la notice biographique sur les frères HIGONET qui sera présentée (avec quelques éléments généalogiques) dans notre ouvrage « St-GEN IEZ-d’OLT-et-d’AUBRAC des femmes, des hommes et leurs racines… » qui paraîtra le 8 septembre prochain.

L’objet exceptionnel qu’est l’ECRITOIRE DE CAMPAGNE DU GENERAL HIGONET sera exposé lors des Journées Généalogiques des 8 et 9 septembre à l’espace culturel de St-Geniez-d’Olt-et-d’Aubrac
http://www.genealogie-aveyron.fr/spip.php?article129

L’entrée aux JOURNEES GENEALOGIQUES DE L’AVEYRON est libre et gratuite.
Vous trouverez les bulletins d’inscription aux repas et aux visites sur le site
 :
http://www.genealogie-aveyron.fr/spip.php?article1293

S.B.